La réforme territoriale et l’avenir des SDIS

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Article publié par La gazette, Hervé JOUANNEAU

« Les SDIS sont un plus pour les départements », déclare Claudy LEBRETON, président de l’ADF à propos de la réforme territoriale. Alors que le 121ème Congrès national des sapeurs-pompiers de France s’ouvre le 1er octobre à Avignon, le président de l’Assemblée des départements de France (ADF), Claudy LEBRETON, s’exprime sur l’avenir des services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), jusque-là ignorés par la réforme territoriale.

Dans un entretien à la Gazette, il appelle à « faire attention à ne pas casser un service public qui fonctionne plutôt bien » et qui a connu « des progrès considérables » avec la départementalisation.

La réforme territoriale laisse planer une grande incertitude sur le sort des départements et par conséquent sur les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS).

Êtes-vous inquiet pour l’avenir de ces SDIS ?

Ne tirons pas des plans sur la comète ! Le conseil départemental existe et va continuer à exister. Les scénarios d’évolution préconisés récemment par le Premier ministre, Manuel Valls, sont annoncés pour l’après 2020.  On n’y est pas encore. La question qui prévaut aujourd’hui, porte sur les compétences qui doivent être rattachées aux départements. C’est tout l’enjeu du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, bientôt examiné au Parlement. Au demeurant, le département assume aujourd’hui ses responsabilités et fait la preuve de son efficacité.

La sécurité civile en est une illustration. Je tiens d’ailleurs à faire observer que près de 50 SDIS sont aujourd’hui présidés par des présidents de conseils départementaux. Cela montre clairement l’intérêt que nous avons pour cette compétence extrêmement importante.

Pour ma part, j’appartiens à ceux qui considèrent que cette responsabilité est un « plus » pour le conseil départemental, en termes de visibilité notamment. Même si, je le conçois, les SDIS ne sont pas faciles à gérer.

Vous êtes donc défavorable à la suggestion, émise au début de l’été par le secrétaire d’Etat à la réforme territoriale, André VALLINI, d’étatiser les SDIS ?

Je peux vous dire que cette proposition d’étatisation ou de nationalisation des SDIS est régulièrement mise sur la table depuis 25 ans. Mais elle ne s’est jamais réalisée.

Faut-il rappeler que les départements financent entre 50 et 60 % des SDIS de France qui représentent une dépense de 5,5 milliards d’euros par an ?

Par ailleurs, posons-nous la question : en nationalisant les SDIS, que deviendraient les 220000 sapeurs-pompiers volontaires ? Irait-on vers une professionnalisation totale des effectifs de sécurité civile ? De toute évidence, l’Etat aurait de grosses difficultés à gérer ces personnels de proximité…

J’appelle donc à faire attention à ne pas casser un service public qui fonctionne plutôt bien et qui est apprécié par l’ensemble de nos concitoyens. Je rappelle à cet effet que Manuel Valls, lui-même, quand il était ministre de l’Intérieur, reconnaissait les progrès considérables dus à la réforme de la départementalisation des services d’incendie et de secours.

Peut-on imaginer de transférer la gestion des SDIS à un autre niveau de collectivité territoriale ?

Les communes ? Après tout, pourquoi pas ? Il faudrait alors envisager un établissement public placé sous leur autorité. Mais une telle situation se heurterait à l’absence de leadership, jusque-là exercé par le département en tant que garant de l’égalité républicaine sur son territoire et communément admis par les maires.

Quant à un éventuel transfert vers les régions, je n’y crois pas. Les régions ne sont pas faites pour gérer des services publics de proximité. Elles inscrivent plutôt leurs actions dans la stratégie, dans l’aménagement du territoire et dans les grands enjeux de l’innovation, du développement économique et de l’emploi.

Que disent les présidents de SDIS, membres de votre ADF ?

Nos membres suivent de très près cette question de l’avenir des SDIS, qui représentent une masse budgétaire très importante. Certains estiment que la gestion des SDIS et des sapeurs-pompiers est difficile et se disent plutôt favorables à la nationalisation. Ce n’est pas la majorité.

Et puis il y a ceux qui assument cette responsabilité. Parmi eux, certains vont même jusqu’à proposer de départementaliser totalement le SDIS, en faisant de cet établissement public autonome un service intégré au département. Cette piste n’est pas nouvelle : elle avait été lancée au début des années 2000 par Daniel VAILLANT, alors ministre de l’Intérieur. Mais les officiers pompiers l’avaient rejetée en bloc, par crainte de se retrouver sous la houlette des directeurs généraux des départements. A mes yeux, pourtant, cette solution me semble inéluctable. Sous réserve que le lien étroit avec les élus soit préservé dans la gestion politique des SDIS.

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Analyse et déclaration de la

CGT du SDIS de la Marne

Les propos de Claudy LEBRETON démontre une fois de plus que les SDIS ne font pas partis des préoccupations premières du gouvernement dans la mise en place de cette réforme territoriale inadaptée et précipitée.

Réforme qui n’a qu’un seul but, détruire les services publics au bénéfice d’une Europe toujours plus privatisée au grand bonheur des capitalistes et dont l’égalité de traitement des citoyens est le dernier de leur souci. En même temps, les rapaces du MEDEF n’ont de cesse de dénoncer le coût des fonctionnaires, alors que chaque euro versé aux collectivités est investi dans un service rendu à la population, contrairement aux aides financières déversées par centaines de millions aux entreprises privées qui ne servent pour la plupart, qu’à gaver les actionnaires. Avec par la même occasion, la complicité des gouvernements sucessifs qui accompagnent se détournement d’argent public.

Ceci étant dit, la réforme territoriale va amener la disparition du conseil général et donc le premier financeur des SDIS. Nous sommes aujourd’hui la patate chaude que se rejettent les différents décideurs politiques face à une direction de la sécurité civile qui se retrouve une fois de plus spectatrice.

L’avenir des pompiers professionnels, des volontaires et des personnels administratifs et techniques ne préoccupe pas les ministères, le chef de cabinet d’André VALLINI, M. Thierry LAURENT lui-même n’a pas su répondre à nos questions lors de notre rencontre le 28 août dernier à la foire de Châlons en Champagne. C’est le flou le plus total et cela laisse libre court à toutes les spéculations possibles : réorganisation par région administrative, par zone de défense, étatisation, …

Nous exigeons, s’il y a réorganisation, que cela se fasse avec les organisations syndicales représentatives et que l’on prenne le temps nécessaire à l’étude, la réflexion et la discussion pour aboutir à une solution qui convienne à tous.

Car beaucoup de choses différencies un SDIS à l’autre :

– L’organisation des secours

– Le règlement intérieur et opérationnel

– La gestion du temps de travail

– Les salaires et le régime indemnitaire

– L’évolution des carrières

– Etc, …

La tâche est d’autant plus grande qu’aucun SDIS en France n’est égal à l’autre face aux risques, notamment sur les types d’intervention qu’ils soient technologiques, chimiques, radioactifs, le niveau d’urbanisation, les transport avec les voies rapides, les aéroports, les voies ferrées et navigables, …

C’est pourquoi nous affirmons qu’il faut sans attendre se mettre autour d’une table pour trouver des solutions alternatives et constructives. Nous ne nous laisserons pas une fois de plus être balancé comme des malpropres. La départementalisation reste gravée dans nos mémoires et nous ne subirons plus ce genre transfère où les agents ont été considérés comme de vulgaires pions.

Il ne fait aucun doute que nous nous battrons, même si nous devons vivre un mouvement social national sans précédent.

Cette réforme nous n’en voulons pas, pas plus que la casse du service public et encore moins de la privatisation des interventions avec à la clé des secours payants. Il suffit de regarder le massacre organisé du service public hospitalier par la loi BACHELOT, ministre de la santé sous SARKOZY, tristement connue sous le sigle HPST (Hôpital. Patients, Santé et Territoires).

La CGT réaffirme qu’il faut maintenir un service public de qualité, égalitaire, gratuit avec des fonctionnaires en emploi statutaire, formés et payés à la hauteur de leurs compétences et des risques encourus.

Et ça, ce n’est pas négociable !

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